La Princesse aux draies


Il était une fois dans un pays lointain
Une jeune princesse qui mourait de chagrin.
Elle était richissime et pourtant malheureuse,
Elle n’était pas très belle et pas d’humeur joyeuse.

Ses dents étaient bancales et toutes cariées,
Les oreilles velues, et les pieds qui sentaient !
Elle avait sur la joue un poireau tout poilu,
Le regard de travers et de plats attributs.

Et puis de bas en haut, ces deux minces guibolles,
Un ventre à bourrelets, et les fesses un peu molles
On pouvait sans critique, dire, en étant gentil,
Que Nature fut sévère avec cette pauvre fille.

Puis un jour sa servante, la voyant toute triste,
Lui dit : « J’ai une idée et pour vous une piste.
Je sais ce qu’il vous faut, j’ai la chose adéquate.
Je suis, pour vous servir et vous offrir un Chat »

« Un chat ? Mais pourquoi faire ? Pourquoi un animal ?
Tu sais bien, mon amie, que je fais fuir les mâles ! »
« Que nenni, ma princesse (Qu’est-ce qu’elle peut être bête !)
Je vous narre un outil qu’on appelle Internet »

« Hein, Terre Nette ? Qu’ès aco ? Autre nom de ‘Green Peace‘ ?
Tu ris ? En attendant, j’ai les dents qui jaunissent ! »
Suite aux explications parfois interminables,
Princesse eut enfin son Ordinateur Portable.

On branche le fatras et en quelques minutes,
La voila exposée aux feux d’un mâle en rut :
« Salut, moi c’est David. Tu peux m’appeler Dave !
Je t’imagine nue. Ce soir, on va en rave ? »

Elle switche aussitôt et tombe sur Kévin :
« Je recherche une blonde, mais à forte poitrine »
Elle coupe encore une fois. Marre de ces mythomanes.
« Bonsoir, belle étrangère. Mon nom à moi, c’est Dan.

Je sens à ta voix douce, que tu es grande et belle.
Sûrement très fragile comme une tourterelle. »
A ces mots, le Corbeau ne se sent plus de joie,
Répond timidement avec ses crochus doigts :

« Je suis grande et bien faite » : ment alors Cunégonde.
« Et je m’appelle Aurore, et suis une vraie blonde.
Mais comment entends-tu ma voix que tu dis douce ?
Je n’ai pas de micro. En plus de ça, je tousse ! »

« Hé bien vois-tu c’est simple, juste de l’intuition.
La façon dont tu as tapé ton beau prénom.
Mais parle-moi de toi. C’est comme si je t’entends,
Car je suis sous ton charme et ton envoûtement »

« Tu peux l’imaginer au seul son de ma voix,
Je suis si courtisée, j’en suis lasse parfois.
Des amis en pagaille dont je ne sais que faire,
Des coureurs de jupons, et même des milliardaires. »

« Tu es faite pour moi. Et je suis déjà riche.
Un cœur gros comme ça. Pour l‘amour, un fortiche !
Si tu veux, dès demain, je demande à ton père
Ta main. Prends mon email : dan@love.fr

Quasimoda débranche, elle est émoustillée,
Si émue qu’elle tremble et qu’elle en sue des pieds.
Elle ne peut contenir sa joie si grandissante
Que, pour la partager, appelle sa servante.

« Qu’avez-vous raconté ? » : Lui dit la jeune sbire.
« J’ai du tout inventer, je n’allais pas lui dire :
J’ai le rhume des foins et le nez qui renifle.
Sans mon Akiléine, j’ai les pieds qui repiflent ! »

« Pensez-vous qu’il soit niais et à ce point crédule ?
Montrez votre séant, que j’ôte vos pustules.
Je suis sûre qu’il ruse, et vous joue de la flûte
Et il n’attend de vous qu’une simple culbute. »

« Ne croyez-vous, ma mie, que je n’aurais point l’âge,
À quarante ans passés de perdre mon pucelage ?
Il doit être câlin, avoir un beau nez, Dan,
Être très bien bâti, et membré comme un âne. »

La Princesse rêvait, n’écoutait plus du tout.
La soubrette est chargée de prendre un rendez-vous.
L’entrevue est fixée pour le surlendemain,
Le temps de s’épouiller et de prendre un bon bain.

Il est l’Heure moins 2. Ses genoux s’entrechoquent.
Elle se pare de bijoux, et de quelques breloques.
S’asperge de parfum, se rase sous les bras,
Sans oublier bien sûr, une tonne de Narta.

Elle arrive au MacDo, se rappelle « Le Signal » :
« J’aurai un tee-shirt bleu et lirai un journal »
Le fast-food est désert, et ce qui la chagrine,
Un seul gamin lisant son « Picsou Magazine »

L’acnéique relève son visage boutonneux :
« J’parie qu’c’est vous la meuf ! », la dévorant des yeux.
« Heu, bonjour mon enfant, tu es avec papa ? »
Holà, t’as rien pigé ! J’te dit que Dan, c’est moi !

J’ai longtemps recherché la morale de l’histoire
Est-il absolument nécessaire d’en avoir ?
Peut-être « D’une union, ne pas en faire un ring,
C’est souvent éviter toute erreur de casting »


(Légèrement inspiré par Shrek, le dessin animé préféré de mon fils, que j’ai du voir 3157 fois !



12 Mars 2004
© Dan Bigeard
Cercle Des Poètes Juifs

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Liste des commentaires (2)


Ca m'a bien fait rire, vous êtes très doué. Et belle morale pour conclure le poème.
, le 16 Octobre 2006

A compter 3157, tu ne dors pas encore ? lol - Poème distrayant et le suspense y est !
Ghislaine RENARD , le 21 Mai 2004